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Eric Cantona boit jaune

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Img_0804Ça s’appelle de «l’événementiel». C’est-à-dire une opération publicitaire ponctuelle au moyen d’un «événement», créé de toutes pièces.

Ainsi, la maison Pernod invitait à découvrir, hier mercredi, dans le patio de la boîte de nuit l’Etoile, le nouveau packaging de sa bouteille de pastis 51.
Bizarre, puisqu’une campagne publicitaire intitulée «Bodega» et associant la féria avec 51 a commencé depuis peu en grandes surfaces !
Attendez, les choses vont s’éclaircir…

Donc, pour déplacer les foules et faire causer, Pernod a recruté en «événement» Eric Cantona. Non pas le King de Manchester, ni l’acteur, mais l’artiste. C’est que, entre autres activités, l’ex-icône footballistique s’adonne à la peinture. Et a accepté de relooker l’étiquette dudit 51.

Petite considération économique, nécessaire, crois-je, à ce stade du récit : si le 51 est le pastis leader dans le sud de la France, il est devancé par Ricard au niveau national (qui appartient au même groupe Pernod-Ricard), et il subit une érosion de ses ventes (menacé par les marques de distributeurs).

Mathieu Deslandes, directeur marketing de Pernod France, explique l’intérêt d’un tel «événementiel» qui, je le rappelle, se produit en pleine campagne Bodega : «On est dans une guérilla de la communication. La campagne Bodega, c’est segmentant [traduction: on s’est mis à dos les anti-corridas], et on doit chercher à tout prix les occasions de prise de parole. Or, Cantona va au-delà de la féria, il est plus national que local, il a un côté anti-conformiste, en plus il peut créer quelque chose.»


De fait, le Marseillais a créé un dessin pour rhabiller le 51. Sur l’œuvre cantonique, affichée en grand dans le patio, figurent plusieurs symboles : deux alliances, marquées «Protis» et «Gyptis», fondateurs dit-on de la cité phocéenne ; des filets (oui, la pêche et l’OM) ; la silhouette de Notre-Dame de la Garde ; et plein de ronds bleus et jaunes…

Modeste, l’artiste prévient : «Si on peut appeler ça une œuvre… J’ai fait ça au crayon et au feutre, puis ça a été retravaillé à la palette graphique avant d’être sérigraphié.»

Pressé par Pierre Coppéré, le PDG de Pernod, de décrypter la création, Cantona s’y résout. Pointant les alliances surmontées d’un voilier, il déclare : «Le mariage, c’est une liberté ensemble pour aller vers des horizons lointains.»
Aaaaah ! Pas grand’chose à voir avec le pastaga, mais suffisamment énigmatique pour provoquer un petit murmure dans le public (beaucoup de gens de Pernod et quelques journalistes), tout comme sa phrase-culte, «quand les mouettes suivent un chalutier, c’est parce qu’elles pensent que des sardines seront jetées à la mer», lancée en 1995 lors d’une conférence de presse.

S’ensuit un bla-bla sur Marseille, terre de «convivialité», etc., que j’ai en partie loupé, m’esbignant à faire la photo.(Je signale que le 51 est fabriqué exclusivement à Marseille, depuis son lancement en… 1951.)

Retour sur la parole cantonienne : «Je me suis déjà associé à d’autres marques, mais c’est la première fois que je m’associe à une marque qui fait partie de mon histoire.[Sourire aux anges du PDG, debout à sa droite]. Mais je ne vais pas encourager à boire trois litres de 51… [Rictus du PDG et, aussitôt, une créature badgée Pernod tend à l’artiste un verre de 51]. Deux bons 51 entre amis, c’est bien.» Ouf, le PDG a eu chaud.

Hélas, la bouteille made in Cantona ne sera pas distribuée en hyper ni supermarchés. La série est limitée, produite à 5000 exemplaires.
Elle ne sera disponible que sur le site en ligne barpremium, au prix de 25 euros, soit dix euros de plus que la bouteille normale.

Mais pourquoi pas en grandes surfaces ? Explications du directeur marketing: «Cantona ne voulait pas que ce soit diffusé en GMS, c’est pas assez prestigieux. Il ne voulait pas se retrouver en produit de grande consommation.»
Donc pas d’affichage, non plus, qui aurait été trop grand public. (Reste que cette campagne Cantona fait admirablement le lien avec l’opération Bodega qui se déroule, elle, en grandes surfaces, puisque Cantona vient de se révéler aussi photographe de corridas. Vous pigez ?)

Pour cette «opération d’image», supposée donner un surcroît de «valeur» au 51, via Cantona, la bouteille collector sera en revanche vendue dans quelques aéroports en duty-free (à Marseille notamment) et offerte aux tenanciers de bars-hôtels-restaurants, bons clients de Pernod. Dame, ce sont des «prescripteurs», souligne le directeur marketing.

Et combien a été payée la vedette ? Je tente un «30 000 euros ?», très mesquin et foireux.
Là, Mathieu Deslandes sourit : «Je ne vous le dirais pas. Face à une telle notoriété, libre à nous de décider la somme et d’estimer si elle économiquement viable.»

Alors 51 000 euros ?

• Marie-Dominique Arrighi •

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